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Version du 11 mars 2023 à 12:18
Hypnosédation - La suprématie de l'esprit sur la matière en salle d'opération
Un article de Tineke DC & Mattias Desmet
Mattias Desmet et Tineke DC - 2023.03.10
L'hypnose est un sujet controversé dans les cercles académiques depuis plusieurs siècles. En particulier, l'utilisation de l'hypnose pour l'anesthésie lors d'opérations chirurgicales a donné lieu à de vifs débats. Récemment, le professeur Mattias Desmet (deuxième auteur de cet article) a remis le sujet sur le tapis dans le cadre de sa théorie sur la formation des masses lors de la crise du corona. Selon lui, la formation de masse et l'hypnose sont presque identiques. Les deux concentrent l'attention sur un petit aspect de la réalité et font perdre conscience du reste de la réalité. Ce mécanisme est très puissant. À tel point qu'une personne dont l'attention est focalisée sur une chose précise par une simple procédure hypnotique - par exemple, sur une certaine séquence d'images évoquées par la voix de l'hypnotiseur - ne ressent plus de douleur, même lorsqu'un chirurgien lui fait une incision dans le corps.
Dans certaines interviews, comme celle avec Alex Jones, Desmet a déclaré : "Je l'ai vu de mes propres yeux - un chirurgien peut couper à travers la peau et la chair, même scier à travers le sternum et effectuer une opération à cœur ouvert sans que le patient s'en aperçoive". Il n'était pas difficile pour l'auditeur bienveillant de comprendre que Desmet parlait dans un style quelque peu hyperbolique d'opérations qu'il avait vues en vidéo (ou du moins qu'il pensait avoir vues en vidéo), ce qu'il a également tenté de clarifier immédiatement après l'interview sur ses médias sociaux (voir le post Facebook du 5 septembre) et dans une sous-paquette ultérieure.
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La réaction des médias a pourtant été vive. Ils l'ont accusé d'être un menteur et un fantaisiste. Une opération à cœur ouvert sous hypnose ? C'est absurde ! Il est temps de se poser calmement la question : Dans quelle mesure l'hypnose peut-elle réellement être utilisée comme anesthésie lors d'une opération chirurgicale ? Nous allons voir que les résultats sont fascinants. Nous verrons également que le sujet de la sédation hypnotique a été fortement stigmatisé pendant des siècles. Pratiquement tous les médecins qui ont écrit sur le sujet - quels que soient la rigueur et le degré d'observation de leur travail - ont été confrontés au mépris, à la marginalisation et, dans certains cas, à l'excommunication.
Commençons par l'état des lieux. Aujourd'hui, l'hypnose est bel et bien utilisée en salle d'opération. Cela ne fait aucun doute. Toutefois, sa fonction est généralement limitée, en ce sens qu'elle est principalement utilisée en remplacement de l'anesthésie générale, généralement en combinaison avec une anesthésie locale (légère). Il n'en reste pas moins qu'il est parfois utilisé seul, sans aucune forme d'anesthésie.
La liste des opérations qui peuvent aujourd'hui être réalisées sous hypnose - en combinaison ou non avec une anesthésie locale - est longue, bien que la technique ne soit pas encore très utilisée (1). Et ne vous y trompez pas, il s'agit également de procédures (très) invasives, telles que les opérations de la thyroïde (par exemple la reine Fabiola en Belgique), les opérations du sein (cancer), la chirurgie des yeux (par exemple la cataracte), l'ablation de tumeurs (par exemple de la peau, mais aussi de la thyroïde - par exemple le cancer du sein), la chirurgie de l'œil (par exemple la cataracte), l'ablation de tumeurs (par exemple le cancer du sein), etc. de la peau - mais aussi de la thyroïde - comme pour la chanteuse française Alama Kante qui a chanté pendant toute l'opération pour sauver sa voix), la stérilisation féminine (ablation de l'utérus), les opérations de hernies de l'aine ou de l'ombilic, les interventions urologiques, les opérations de hernies, les greffes d'os, les opérations de l'artère carotide, et même les opérations du cerveau et du cœur. À l'époque (en 2018), des informations trompeuses circulaient sur ce dernier cas (français) : des vidéos sur internet et la presse française parlaient (bruyamment) d'une opération à cœur ouvert, alors qu'il s'agissait en réalité d'une opération cardiaque par l'aine. Cette "vérification des faits" a corrigé cette erreur à juste titre. Outre les articles (de journaux), il existe également des documents visuels d'opérations (invasives) sous hypnose (comme ici, ici, ici et ici). Les anesthésistes bruxelloises Christine Watremez et Fabienne Roelants appliquent également l'hypnose à leurs patients chirurgicaux et ont même réalisé un documentaire impressionnant à ce sujet en 2020, intitulé Ma voix 't accompagnera.
Il est important de mentionner ici que l'hypnose telle qu'elle est utilisée aujourd'hui en salle d'opération n'est en fait que "la partie émergée de l'iceberg". En général, les gens réalisent à peine la riche histoire qui précède cette redécouverte contemporaine.
L'histoire moderne de l'hypnose commence vers 1768 avec le médecin viennois Franz Anton Mesmer (1734-1815). On peut résumer les idées de Mesmer comme suit : certaines personnes ont la capacité d'influencer les autres grâce à un fluide qu'il appelle le "fluide animal" (2). Selon lui, l'univers est rempli d'un fluide magnétique, plus subtil que l'éther, qui peut être transféré du magnétiseur au patient. Cette transmission du "magnétisme animal" aurait un effet thérapeutique puissant. Cependant, l'opinion publique s'est retournée contre Mesmer et le monde universitaire a suivi l'opinion publique. L'école de médecine attribue son succès au pouvoir de l'"imagination" et le qualifie de fraude pure et simple. Mesmer est exclu de la faculté de médecine de Vienne en 1774 pour "pratiques charlatanesques" et part pour Paris.
Cependant, le "mesmérisme", nom donné par la suite à la procédure par son initiateur (et donc essentiellement précurseur de l'hypnose), s'est avéré utile dans la pratique médicale à bien des égards. Par exemple, il s'est avéré très efficace pour induire l'anesthésie dans toutes sortes d'interventions chirurgicales (3). Un exemple sensationnel est l'opération d'une femme atteinte d'un cancer du sein avancé, réalisée par M. Jules Cloquet, l'un des chirurgiens parisiens les plus éminents de l'époque (3, p. 598). La patiente a été hypnotisée, puis le chirurgien a pratiqué une incision de l'aisselle jusqu'à l'intérieur de la poitrine (en haut et en bas) et a excisé la tumeur et les glandes enflées. L'opération a duré en tout et pour tout 12 minutes. Le plus intéressant, c'est que pendant tout ce temps, le patient a continué à parler calmement au chirurgien et n'a pas montré le moindre signe de douleur. Il n'y a pas eu de mouvement détectable des membres du patient, ni de modification des traits du visage, de la respiration ou de la voix. Même le pouls a conservé son rythme normal.
Nous ne réalisons pleinement la valeur médicale de la technique de Mesmer que lorsque nous nous rendons compte que nous nous trouvons à une époque où il n'y avait pas d'anesthésie chimique. Par exemple, l'éther et le chloroforme n'existaient pas encore pour anesthésier les patients. À cette époque, l'opération chirurgicale était quelque chose de carrément intimidant. On essayait d'induire une certaine anesthésie avec des feuilles de coca, de l'alcool ou du jus de pavot, ou si nécessaire, on assommait le patient avant de commencer l'intervention. Aucun de ces remèdes n'ayant donné de résultats vraiment convaincants, on attachait fermement le patient par mesure de sécurité. La situation n'était pas différente. La douleur est une souffrance insurmontable qui fait partie de la vie humaine. Dieu a demandé l'acceptation de cette douleur - d'autres remèdes qu'il n'avait pas encore fournis.
Il n'est donc pas surprenant que le taux de mortalité des opérations réalisées dans ces conditions soit très élevé. Les patients étaient donc souvent très motivés pour s'ouvrir à tout ce qui pouvait alléger leurs souffrances, comme la méthode de Mesmer. Pourtant, les médecins et les chirurgiens qui utilisaient le "mesmérisme" étaient généralement traités avec incrédulité et hostilité. L'establishment médical traditionnel se protégeait, même si cela compromettait directement sa raison d'être initiale, à savoir minimiser la souffrance. Certaines caractéristiques humaines mesquines sont apparemment intemporelles.
Vers 1841, on assiste à une résurgence de l'utilisation de l'hypnose dans la pratique médicale. En France et en Angleterre, de plus en plus d'interventions dentaires (comme des extractions de dents) sont pratiquées sous hypnose. Mais c'est surtout le prestigieux médecin et professeur anglais John Elliotson (1791-1868) qui devient le chef de file du mouvement "mesmérique" de l'époque. A partir de 1837, il se consacre presque entièrement à ce sujet (3, 4). Ici aussi, on observe la résistance typique et acharnée de l'ordre établi. Ainsi, Thomas Wakley, fondateur de la prestigieuse revue médicale britannique The Lancet, a mené pendant des années une lutte acharnée contre Elliotson. Sous l'énorme pression de l'establishment médical, il finit par démissionner de l'University College Hospital de Londres en 1838.
Elliotson ne cesse pas pour autant de parler en dissident. Il reste déterminé à promouvoir le mesmérisme dans la pratique médicale. Cela lui valut l'appréciation et l'amour d'un large public, parfois célèbre. Au bout d'un certain temps, par exemple, il put compter les écrivains britanniques William Thackeray et Charles Dickens parmi ses amis. Il a également réalisé quelque chose dans la pratique : sous sa supervision, de nombreuses interventions chirurgicales ont été réalisées (sans douleur) sous anesthésie induite "mesmérique" dans des services spécialement aménagés à Edimbourg et à Dublin, entre autres. Ce n'était pas une mince affaire. Il s'agissait sans aucun doute d'une avancée humanitaire majeure à une époque où l'anesthésie chimique n'était pas encore disponible. Et il ne s'agissait pas d'opérations anodines. Des procédures telles que les amputations de membres faisaient partie du cours "normal" des événements. On trouve des descriptions extrêmement détaillées de ces opérations dans la littérature médicale (voir par exemple ici, aux pages 107-111 de l'article). Ironiquement, 60 ans plus tard, The Lancet a publié le récit détaillé d'une femme dont la jambe a été amputée - sans aucune douleur - sous hypnose.
Les travaux d'Elliotsons ont été repris vers 1845 par le médecin écossais James Esdaile (1808-1859). Il était responsable d'un "hôpital mesmériste" à Calcutta, dans l'Inde colonisée du XIXe siècle. Dans cet hôpital, outre d'innombrables interventions mineures, les opérations les plus invasives étaient pratiquées sous hypnose (ce que l'on appelait encore à l'époque le "mesmérisme"). Très important : comme pour son prédécesseur, cela s'est fait sans aucune forme d'anesthésie chimique supplémentaire. Les principales opérations comprenaient : des amputations (y compris une amputation du pénis), des opérations de la cataracte, des opérations pour une hernie étranglée et plusieurs centaines d'opérations pour enlever des tumeurs scrotales géantes (une affection courante chez les hommes indiens de l'époque due à une maladie parasitaire) (3, 5). L'une des plus grosses tumeurs enlevées sous hypnose ne pesait pas moins de 80 livres ( !). La description concrète de cette opération est toujours disponible (vous trouverez la description du cas ici, p. 104 de l'article). Vous pouvez également lire le livre controversé d'Esdaile (datant de 1851) (à télécharger gratuitement ici).
L'hôpital d'Esdaile n'était pas seulement ouvert aux médecins, mais aussi au grand public. Une plus grande transparence est difficilement imaginable. Chaque jour, les gens vérifiaient d'un œil critique cette pratique médicale extraordinaire. L'authenticité de la littérature sur les interventions d'Esdaile a été extraordinairement bien étayée à d'autres égards. Par exemple, une commission d'enquête spéciale a même été mise en place à la demande du gouverneur local. Cette commission a confirmé que (les patients observés) ne ressentaient miraculeusement aucune douleur pendant les opérations. Esdaile a également fait publier ses fascinantes découvertes hypnochirurgicales dans des journaux locaux anglais et indiens, afin que tous ceux qui le souhaitaient puissent également en prendre connaissance de cette manière.
Mais là encore, cette remarquable résistance à l'hypnose s'est manifestée. Malgré la grande transparence de la pratique d'Esdaile, les médecins et le public profane mettent en doute son authenticité. Ainsi, après Mesmer et Elliotson, ce médecin écossais est lui aussi marginalisé et ridiculisé.
Esdaile lui-même l'a résumé de manière poignante : "Mais le praticien de routine condescend rarement à partager avec la nature le mérite de la guérison. C'est à lui et à ses pilules, poudres et potions que revient tout le mérite ; et si quelqu'un prétend pouvoir parfois guérir une maladie grâce aux pouvoirs naturels, il est traité de charlatan, d'imposteur ou de fou..." (James Esdaile, 1846) (5). Notons ici qu'Esdaile - comme Elliotson - n'a pas été découragé par les critiques hostiles. Il a soutenu que l'humanité souffrante ne pouvait se permettre d'attendre le lent processus de prise de conscience et de changement de mentalité et, marginalisé et stigmatisé, il a tranquillement poursuivi sa pratique jusqu'à ce qu'il retourne à sa base d'origine en Écosse en 1851.
Un contemporain d'Elliotson et d'Esdaile est James Braid (1795-1860), un chirurgien de Manchester qui a rebaptisé le mesmérisme vers 1843. Il ne considère plus le phénomène en termes de "magnétisme animal" (comme Mesmer et ses disciples), mais propose une théorie plus psychologique. Il y voit un état particulier du système nerveux qui conduit à une sorte d'état de sommeil pouvant être induit artificiellement par la suggestion verbale. Il l'a donc désigné par le terme hypnotisme ou hypnose (du grec hupnos, "sommeil" ; étymologiquement dérivé de hypo-gnosis, qui signifie "diminution de la cognition ou de la conscience"). L'essence de la procédure hypnotique consiste à concentrer l'attention sur une seule idée (mono-idéisme). Cette focalisation de l'attention entraîne des effets psychologiques et physiques importants par le biais d'une série de mécanismes.
Braid n'a pas seulement apporté une contribution conceptuelle et théorique, il a également utilisé l'hypnose de manière efficace dans la pratique. A Londres, par exemple, il a pratiqué un certain nombre d'opérations sur des patients anesthésiés par l'hypnose (2). Sa pratique était essentiellement la même que celle de ses prédécesseurs, et la réaction du corps médical est restée inchangée : il a été traité avec hostilité, et son travail est mort d'une mort relativement tranquille. Cependant, le terme "hypnose" a résisté à l'épreuve du temps et est encore utilisé aujourd'hui.
Outre le fait que ces pionniers de l'hypnochirurgie se heurtent à une opposition farouche, un autre facteur fait tomber leurs travaux dans l'oubli : la découverte de l'anesthésie chimique. L'introduction de l'éther en 1846 et du chloroforme en 1847 allait bientôt réduire l'importance de l'hypno-anesthésie en chirurgie. La médecine traditionnelle a (à juste titre) accueilli ces remèdes avec des applaudissements nourris, mais a immédiatement considéré que l'hypnose était dépourvue de toute pertinence pratique. Dans son enthousiasme, elle a toutefois oublié un élément qui devient aujourd'hui de plus en plus évident : le processus de rétablissement se déroule généralement beaucoup plus facilement après une intervention chirurgicale utilisant l'hypnose au lieu de l'anesthésie chimique générale. De plus, l'hypnose permet d'éviter les effets secondaires (souvent importants) de l'anesthésie générale. Les partisans modernes de l'hypnosédation soulignent à juste titre ces deux avantages, montrant ainsi que l'importance pratique et clinique de l'hypnose n'appartient en aucun cas au passé.
Avec l'introduction de l'anesthésie chimique, la médecine traditionnelle s'est aussi immédiatement déchargée de la responsabilité d'étudier plus avant l'impact mystérieux de la conscience sur le corps, qui est si concret et si évident dans le phénomène de l'hypnose. Or, c'est précisément cet impact qui constitue l'une des caractéristiques les plus fascinantes de l'être humain. La tendance à l'ignorer doit être considérée comme une conséquence typique de la vision matérialiste-mécaniste, biologique-réductionniste de l'homme et du monde qui domine dans notre société. Nous y reviendrons plus en détail dans un prochain essai de substack.
Même après la découverte de l'anesthésie chimique, l'utilisation de l'hypnose a connu une résurgence de temps à autre. Le chirurgien irlandais Jack Gibson (1909-2005), par exemple, est devenu une légende dans le monde de l'hypnochirurgie. Médecin fraîchement diplômé en mission à l'étranger, il a découvert les effets bénéfiques de l'hypnose dans les années 1930. Un membre d'une tribu bédouine du Moyen-Orient refusait toute forme d'anesthésie, mais l'a tout de même autorisé à lui retirer une excroissance sur sa jambe, logée entre les muscles. Gibson était convaincu que l'intervention avait causé une grande douleur à son patient, mais il s'est rendu compte plus tard que le membre de la tribu était sous auto-hypnose et n'avait souffert d'aucune douleur.
Cette expérience a ouvert une porte mentale à Gibson. Dans les décennies qui ont suivi, il s'est entièrement consacré à l'utilisation de l'hypnose en salle d'opération. Il a réalisé plus de 4 000 opérations sans anesthésie, allant de la chirurgie plastique aux amputations. En outre, il a aidé d'innombrables personnes à surmonter leurs dépendances à l'alcool et au tabac, et a également utilisé l'hypnose pour traiter de nombreuses autres maladies chroniques. Il considérait la force de l'esprit comme l'une des médecines les plus puissantes, voire les plus sous-estimées, qui soient (6, 7).
Ses livres, ses enregistrements audio et vidéo montrent comment l'hypnose permet d'accéder au subconscient. Il a esquissé une théorie qui, sur le plan des idées de base, n'est pas très éloignée de celles de Breuer et de Freud. Pour atteindre le cœur d'une maladie, il faut pouvoir utiliser la puissance du subconscient. C'est la seule façon de s'attaquer à la cause d'un problème au lieu de continuer à traiter les patients de manière symptomatique : "Si nous, médecins, n'acceptons pas ce fait, nous sommes des cow-boys. Des cow-boys sans lasso, car si nous ne parvenons pas à attraper cette bête insaisissable, nous continuerons à voir d'effroyables souffrances et morts inutiles dues à des maladies psychosomatiques facilement curables" (7). A la fin de sa vie, Gibson écrivait un livre sur l'hypnose en chirurgie, dont un chapitre était consacré au chirurgien écossais James Esdaile mentionné ci-dessus. Malheureusement, son décès (à l'âge béni de 95 ans) a empêché l'achèvement de ce livre.
Bien que peu de médecins aient suivi l'exemple de Gibson, la British Medical Association a déclaré en 1955 que "l'hypnose a sa place dans l'anesthésie et l'analgésie pour les interventions chirurgicales et dentaires". Elle a également déclaré que chez les femmes enceintes, l'hypnose peut être une méthode efficace pour soulager la douleur de l'accouchement sans perturber le déroulement normal du travail (2). Il convient de noter que l'hypnose telle qu'elle apparaît aujourd'hui dans l'arsenal thérapeutique est différente de l'hypnose traditionnelle du XIXe siècle. De nos jours, on parle surtout d'"hypnose ericksonienne", un terme qui fait référence à Milton H. Erickson (1901-1981). Ce psychiatre américain a développé des techniques d'induction et de guidage pour induire une transe hypnotique qui fonctionne pour un plus grand nombre de personnes. Il s'agit d'une évolution importante. L'hypnose est donc devenue plus largement applicable et répondait de plus en plus aux critères que tout instrument thérapeutique doit remplir : fiabilité, reproductibilité et prévisibilité (2).
Nous devons absolument présenter une autre figure dans cet article. Un nom moins connu dans notre région, mais tout sauf insignifiant, est celui de Dave Elman (1900-1967). Cet hypnothérapeute a développé un style d'hypnose radicalement différent de celui d'Erickson, beaucoup plus direct et rapide. Il est surtout connu pour avoir redécouvert "l'état d'Esdaile" - l'état hypnotique que nous avons décrit plus haut en référence au médecin indien qui utilisait l'hypnose comme anesthésiant pour les opérations les plus invasives.
Dans un sens, cependant, il n'est pas vrai qu'Elman ait simplement redécouvert la technique d'Esdaile. Il a fait plus que cela. Alors qu'à l'époque, il fallait quelques heures à Esdaile pour atteindre une transe hypnotique profonde, Elman y parvenait en quelques minutes seulement. De 1949 jusqu'à sa crise cardiaque en 1962, Elman a formé des milliers de médecins, de dentistes et de personnel médical aux États-Unis à l'utilisation de ses techniques d'hypnose et a aidé d'innombrables chirurgiens à réaliser des opérations sans douleur en utilisant uniquement l'hypnose comme anesthésiant. Il a fait tout son possible pour obtenir une induction rapide de l'état hypnotique, car il était convaincu que si la procédure durait plus de 3 à 5 minutes, ces médecins ne s'intéresseraient guère à la technique. Et il a réussi. Il est devenu célèbre parce que sa technique lui a permis de réaliser avec succès des interventions chirurgicales très invasives sous hypnose, y compris des opérations à cœur ouvert en utilisant uniquement l'hypnosédation. Dans les articles (internet) (8, 9, 10, 11) et dans le livre d'Elman (Hypnotherapy. Dave Elman, 1970), on peut lire qu'aucune anesthésie chimique n'a été utilisée parce que le patient en question était si faible que toute forme de sédation chimique lui aurait été fatale.
Dave Elman a enrichi l'hypnothérapie de son propre style de travail direct. Il est décédé le 5 décembre 1967. Son fils, le colonel H. Larry Elman, poursuit sa pratique. Une belle réponse sommaire de Larry Elman à la question de savoir s'il est possible de subir une chirurgie indolore sous hypnose sans aucune forme d'anesthésie chimique se trouve ici. Nous citons le passage le plus important : "... Le cas dont papa était probablement le plus fier était la première opération à cœur ouvert sans anesthésie chimique. C'était vers 1954. Le patient avait désespérément besoin de l'opération et on ne s'attendait pas à ce qu'il survive sans elle. L'anesthésiste chargé de l'opération n'avait trouvé aucun produit chimique anesthésiant approprié - tous étaient trop forts et risquaient de tuer le patient. S'il n'opère pas, le patient mourra. S'il opère avec les anesthésiques disponibles, le patient mourra. Qu'en est-il de l'hypnose ? Le chirurgien et l'anesthésiste étant tous deux diplômés du cours d'hypnose médicale de Dave Elman, ils ont appelé mon père. Il a répondu qu'il n'avait jamais entendu parler d'une telle chose. Ils lui ont demandé d'être présent dans la salle d'opération en tant que coach hypnotique et ont procédé à l'opération le lendemain. Le patient s'est complètement rétabli".
Le fils de Dave Elman gère toujours les archives de son père, qui comprennent les dossiers médicaux d'opérations à cœur ouvert sous hypnose. Une étude approfondie de ces dossiers est essentielle dans la discussion académique sur la valeur de l'hypnose en tant que sédation. Néanmoins, certains adeptes fanatiques de la vision matérialiste-mécaniste doutent à l'avance de l'authenticité des affirmations d'Elman. Comme nous l'avons dit ailleurs, c'est leur droit (voir le sous-sac Quelques notes sur les tentatives tragicomiques de me brûler sur le bûcher). En fin de compte, nous nous appuyons tous sur beaucoup de choses que nous croyons et sur peu de choses que nous avons réellement observées. Et même dans ce cas, les perceptions sont également subjectives à bien des égards.
Le professeur Dr Marie-Elisabeth Faymonville - l'anesthésiste belge qui a relancé l'hypnose dans le bloc opératoire après des décennies de méfiance en 1991 - a cependant déclaré il y a quelques années dans une interview au journal belge De Morgen (lire ici pour les non-abonnés) que l'hypnose ne peut pas être utilisée dans les opérations à cœur ouvert. Ses arguments ne sont pas tout à fait clairs, mais elle cite comme raison que le cœur doit être arrêté pendant de telles procédures. Elle suggère que cette limitation technique empêche l'utilisation de l'hypnose comme substitut à l'anesthésie générale. Cet argument est quelque peu discutable pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, un chirurgien cardiaque renommé nous a signalé que, contrairement à ce que suggère le professeur Faymonville, le cœur n'est pas toujours arrêté lors d'une opération à cœur ouvert. Une minorité de chirurgies cardiaques avec sternotomie complète (c'est-à-dire ouverture complète du sternum) est effectuée sur un cœur battant, a-t-il précisé. Opérer sur un cœur battant est considérablement plus difficile et exige beaucoup du chirurgien, et est donc probablement évité dans de nombreux cas. Mais cela arrive. Cela peut également être vérifié sur des sites web d'information : il existe en effet deux façons de réaliser une opération à cœur ouvert, avec ou sans arrêt du cœur. A l'hôpital universitaire de Louvain (Belgique), la majorité des opérations sont même réalisées sur le cœur battant, sans l'intervention de la machine cœur-poumon (12). En d'autres termes, il n'est pas vrai que la chirurgie à coeur ouvert sous hypnose soit intrinsèquement impossible car le coeur doit toujours être arrêté.
Deuxièmement, dans des cas exceptionnels, les opérations à cœur ouvert sont également réalisées sous anesthésie locale et non générale. Il existe même des images d'opérations à cœur ouvert où le patient reste conscient tout le temps et assiste à sa propre opération. Dans ces cas, le cœur a été arrêté sans anesthésie générale. Il arrive également que des opérations à cœur battant soient réalisées sans anesthésie générale (comme le montre cette vidéo).
Étant donné que toutes les interventions qui peuvent être réalisées sous anesthésie locale peuvent également être réalisées en combinant anesthésie locale et hypnose (2), il est évident que l'hypnose peut également être utilisée dans le cadre d'une opération à cœur ouvert. Ce témoignage intéressant (et amusant) d'un homme qui a subi une opération à cœur ouvert alors qu'il était pleinement conscient et qu'il utilisait des techniques de gestion de la douleur, démontre également l'énorme potentiel de l'influence psychologique pendant l'opération.
Et pour aller plus loin : si scier une jambe est possible sous hypnose, sans aucune forme d'anesthésie (comme décrit par exemple dans l'article du Lancet mentionné ci-dessus), avons-nous alors beaucoup de raisons de douter que scier le sternum sous hypnose, sans aucune forme d'anesthésie, soit également possible ? Tout porte à croire que l'exploit de Dave Elman - une opération à cœur ouvert sous hypnose - est bel et bien possible.
Il n'est évidemment pas surprenant que la pratique contemporaine de l'hypnosédation n'aille pas aussi loin que la pratique des pionniers du 19ème siècle, qui opéraient sans anesthésie par nécessité. Les progrès de la médecine (comme l'anesthésie chimique) ne l'exigent plus. Et peut-être plus important encore : l'esprit du temps qui évolue de plus en plus dans une direction biologique-réductionniste, avec une pression croissante sur les médecins pour qu'ils adhèrent aux protocoles "classiques" pendant les procédures, ne permet tout simplement plus d'opérer sans une forme ou une autre d'anesthésie. Si les opérations sous hypnose sont aujourd'hui systématiquement combinées à une anesthésie locale, ce n'est pas en raison du pouvoir limité de l'hypnose, mais de l'ouverture limitée de la mentalité médicale moderne.
Le Dr Sabine Maes, anesthésiste et collègue du prof. Faymonville, déclare à propos du potentiel sédatif de l'hypnose que, à proprement parler, l'hypnose peut complètement remplacer l'anesthésie chimique classique, mais que son utilisation est aujourd'hui (principalement) limitée à certaines procédures sous anesthésie locale, avec l'hypnose comme adjuvant (13). En d'autres termes, l'ancienne pratique hypnochirurgicale et la médecine occidentale ont fait un compromis dans la salle d'opération - et nous ne pouvons bien sûr que nous en féliciter. Reste à savoir dans quelle direction ce compromis sera ajusté à l'avenir. Tout dépend de la mesure dans laquelle la vision matérialiste et mécaniste de l'homme reste dominante, plutôt que de la question de savoir si l'hypnose est réellement si puissante qu'elle permet des opérations sans douleur et sans anesthésie. Nous devons sans aucun doute répondre à cette dernière question par l'affirmative.
L'hypnose et l'hypnosédation s'inscrivent en fait dans un éventail beaucoup plus large de phénomènes qui nous montrent que la conscience humaine a une influence extraordinaire sur le corps. L'impact négatif de l'anxiété et du stress sur le système immunitaire, l'effet placebo, et même la "mort psychogène" (lorsque quelqu'un meurt d'une malédiction) sont autant de phénomènes qui démontrent l'influence curieuse et profonde des représentations mentales sur le corps (pour plus d'informations à ce sujet, voir cet article publié précédemment). Si ces phénomènes fascinent, ils suscitent également de vives résistances, en particulier dans le monde académique. Les scientifiques et les médecins qui attirent l'attention sur ce phénomène sont souvent ridiculisés, même s'ils étayent leur discours. Le destin des grands auteurs sur l'application médicale de l'hypnose l'illustre de manière frappante.
La question qui se pose est donc la suivante : Qu'est-ce qui provoque cette résistance à des choses comme l'hypnose ? En dernière analyse, nous ne pouvons que conclure que c'est parce qu'elles ébranlent la vision dominante de l'homme et du monde.
La vision dominante de l'homme et du monde est indubitablement de nature mécaniste-matérialiste. L'univers est un ensemble de particules élémentaires qui interagissent selon les lois de la mécanique - c'est une grande machine. Et l'homme est une petite machine, un engrenage qui s'emballe dans la grande machine de l'univers. L'homme est un processus biochimique et tout peut être expliqué à partir de ce processus. La conscience de l'homme - ses pensées et ses sentiments - est un effet secondaire accidentel du cliquetis des rouages dans sa tête. Ce point de vue est porteur de grandes espérances et de grandes ambitions. Si nous comprenons suffisamment bien la machine humaine, nous pourrons en réparer tous les défauts. Toutes les maladies et toutes les souffrances seront finalement éradiquées par l'ingénieur médical.
C'est précisément cette illusion que les observations sur l'hypnose sont en train de briser. L'hypnose nous montre que la conscience humaine n'est pas seulement un effet secondaire passif des processus biochimiques du cerveau. La conscience n'est pas seulement un produit des processus corporels ; les processus corporels sont également un effet de la conscience. Cette confrontation avec le pouvoir de l'esprit effraie le penseur mécaniste. Elle menace son illusion de la malléabilité mécanique de l'homme. Lorsque l'esprit a le pouvoir sur le physique, la possibilité de contrôler l'existence humaine - et l'esprit humain en particulier - par une manipulation parfaite et rationnelle du corps disparaît.
L'homme redevient alors une créature qui doit faire face au phénomène insaisissable et difficilement contrôlable de son propre esprit et de son âme et glisse dans un monde où il n'y a plus de certitudes rationnelles. En d'autres termes, l'homme est à nouveau pleinement confronté à son plus grand tourment : l'incertitude atroce de son existence. Pour se débarrasser de ce tourment, il s'enferme dans une vision désenchantée et rationaliste du monde.
Il existe cependant d'autres moyens de gérer l'incertitude, oui, de trouver dans l'incertitude fondamentale de l'existence humaine la condition pour être vraiment humain. Et une fois que l'homme aura surmonté la peur des limites de sa compréhension rationnelle, il pourra aussi généralement voir sans grand effort ce que les pionniers de l'hypnosédation mentionnés plus haut ont essayé de nous montrer : l'esprit a le pouvoir le plus stupéfiant, même dans la salle d'opération.
Source : https://mattiasdesmet.substack.com/p/hypnosedation-mind-over-matter-in
Traduit avec l’aide de DeepL.com